Fiche terroir

Pays Pourlet

Vannetais

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Communes du pays Pourlet

Berné
Bubry
Guémené-sur-Scorff
Inguiniel
Kernascleden
Langoëlan
Le Croisty
Lescouët-Gouarec
(partie sud)
Lignol
Locmalo
Mellionnec (patie
sud)
Meslan
Persquen
Plouray
Ploërdut
Priziac
Saint-Caradec-Trégomel
Saint-Tugdual
Séglien
Silfiac

Le terroir

Le pays Pourlet fait partie de l’évêché de Vannes, et est  entouré des pays : Fisel, Chtou, de Lorient, de Baud, de Pontivy, et du Koste ‘r c’hoed. Les limites selon les témoignages des locaux sont assez floues, elles ne sont pas forcément les mêmes si l’on parle de langue, de costume ou de danse. Selon Paul Le Bourlais (Guémené-sur-Scorff : Pays des Pourleths), au Xe siècle, à l’époque des invasions normandes, un groupe de population des environs de la ville actuelle Saint-Malo « aurait été transporté sur un territoire actuel de Locmalo, commune à 800 mètres de Guéméné ». Le terme de « Pourleth » ou « Pourlet » serait ainsi directement issu de celui de « Plou Aleth », c’est-àdire le nom du diocèse de Saint-Malo.

Danses principales

La gavotte

La danse principale de ce terroir est la gavotte pourlet. Elle appartient à cette grande famille des gavottes de Bretagne, qui toutes ont pour origine le Trihory. L’étude, à ce niveau, qu’en a fait Jean-Michel Guilcher dans La tradition populaire de danse en Basse-Bretagne, reste la référence pour une étude plus poussée. Anciennement le terme de « gavotte » n’était pas usité et la danse était le plus souvent appelée « dro feucht » ou « dañs a ruz ».

Autres danses

• Tro’l leur
• Bal pourlet
• Poignée de mains de Kernascleden
• La quenouille

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Danse bretonne  du Morbihan.  Collection Le Carton  Voyageur

La gavotte de Guémené

Extrait du livre Guémené-Sur-Scorff, pays des Pourleths, de Paul Le Bourlais « Au début de ce siècle, la danse était toujours la distraction favorite des Guémenois. La fameuse gavotte était exécutée dans tous les quartiers de la ville et principalement sous les vieilles halles. Cette danse particulière au pays Pourleth est différente de celle des autres régions bretonnes, comme l’est aussi le tempérament de ses habitants. Quand nous l’avons connue, à cette époque, c’était un vrai régal que de voir nos Guémenois exécuter leur gavotte ; l’âme pourleth s’y reflétait avec toute sa fougue, sa finesse et son exaltation. La bombarde et le biniou juchés sur leur tonneau, en étaient les musiciens.
La bombarde faisait figure de chef d’orchestre, c’est lui qui, en scandant les différents mouvements et en nuançant les airs, animait la danse ; le biniou était l’accompagnateur qui permettait, par son jeu continue, à son compagnon de souffler. Certaines de ces bombardes étaient doués, sans le savoir, d’un tempérament d’artiste ; tel un chef de ballet, ils « dansaient » leurs airs, accentuant ou modérant les mouvements, les prolongeant ou les écourtant selon l’ambiance, accompagnés toujours deux coups de talons plus ou moins forts qui se répercutaient par le tonneau vide comme sur une espèce de gong.
Cela commençait par un prélude, solo de bombarde gai et vif, véritable invitation à la danse ; à ce signal deux couples se présentaient au milieu de l’aire de la fête pour « ouvrir » la gavotte. Ils se mettaient en cercle, se tenant par le petit doigt et aussitôt les musiciens « sonnaient » le bal. Après quelques pas faits en ronde et agrémentés de sauts avec claquements de talon, c’est deux premiers
couples rompaient leur cercle et se mettaient en file, l’un des hommes en tête, l’autre en queue, les deux cavalières entre les cavaliers. L’air joué par la bombarde et le biniou était un mouvement calme et modéré, espèce d’adagio permettant à la file de s’allonger part de nouveaux couples qui, se tenant par le bras, s’intercalaient entre les deux premiers, le cavalier prenant le petit doigt de la cavalière qui le précède. Quand tous les amateurs étaient en place, la bombarde, soufflant alors plus fort dans son instrument, passait à ce qu’on pourrait appeler le « vivace » Oh ! Ce vivace pendant lequel se manifestait, plus qu’à un autre moment chez les chez c’est pourleth liés par le bras et le petit doigt, les instincts rythmés de la race. Entrechats, sauts, cris se multipliaient ; il y avait des danseurs et des danseuses plus souples, plus fantaisistes aussi, qui se faisaient remarquer, dans cette ambiance de joie et d’exultation, par la multiplication de pas compliqués et mieux exécutés, cela les classait ; des vieux de chez nous parlent encore avec admiration de ces « célébrités ». Parfois la bombarde lui-même, enthousiasmé par cette débauche de rythmes, s’accordant si parfaitement avec sa musique, se laissait aller à de géniales improvisations, redonnant aux danseurs, quelque peu essoufflés, de nouvelles jambes, et la gavotte repartait, plus brillante est plus « folle » encore, jusqu’à ce que le chef d’orchestre jugeât bon de jouer un air plus tranquille et plus à l’aise pour les acteurs comme pour lui. Ce calme permettait au couple de tête de permuter avec celui de queue et la danse continuait dans la même ambiance avec les nouveaux « meneurs », pour finir enfin posément sur une note traînante de bombarde.
Nous voyons encore danser la gavotte de Guémené, surtout par des groupes folkloriques ; bien sûr, ils exécutent correctement le pas, mais le mouvement reste plutôt monotone ; leur gavotte est devenue une espèce de danse classique dans laquelle on ne décèle plus un état d’âme, celui des Pourleths, ces inimitables Bretons. Cependant nous avons retrouvé, lors de réjouissances paysannes, à peu près le même élan et lamême verve dans l’accomplissement de notre danse ; quelques anciens donnent le rythme d’autrefois que les jeunes imitent parfaitement et instinctivement pourrait-on dire.
Nous avons dit que Guémené restait le centre commercial le plus important de toute la région. Bien entendu, c’est est aussi le lieu de rendez-vous de la jeunesse qui venait y danser à toutes les occasions : foires est fêtes, faisant des démonstrations de cette gavotte que nous venons de décrire. Parfois en ces occasions les jeunes hommes faisaient voir leur tempérament impétueux par des batailles à coups de poing, dont les motifs étaient, le plus souvent, des rivalités entre gars de communes différentes. Ces bagarres se renouvelaient encore, pour les mêmes motifs, les jours de tirage au sort qui amenaient au chef-lieu de canton tout une belle jeunesse pour cette fameuse opération qui désignait, à l’avance, les futurs soldats. Quels bizarres instincts incitaient ces Breton pourleth à se battre ; anciennes rivalités de clans ? Cette pointe de sang normand qui coulerait dans leurs veines ? »

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L’accompagnement musical

Le chant avec alternance meneur/choeur est le premier  des accompagnements. Le couple biniou/bombarde est  très présent dans ce terroir, les sonneurs du pays Pourlet  étaient très réputés. Accordéon diatonique, puis chromatique  et enfin jaze (accordéon chromatique, saxophone et  petite batterie) ont également existé. 

On peut dire qu’en pays Pourlet, il n’y pas eu de rupture de tradition musicale mais adaptation aux instruments nouveaux, pérennisant les différents airs de gavotte, et introduisant de nouveaux airs empruntés aux répertoires urbains.

Mariage en pays Pourlet. Collection Le Carton Voyageur

Yves Burban à l’accordéon et Pierre Bédard à la bombarde à Saint-Yves-Bubry en 1979, photo Yvon Kervinio. Collection Musée de Bretagne
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Le costume

En pays gwenedour, la coiffe portée majoritairement sur tout le pays est surnommée la « brouette », on y trouve également un capot, surnommé localement le « capot ribot ». Le costume masculin est quant à lui appelé le « mil boutons », en lien avec les nombreux boutons qui ornent les vestes et gilets des hommes du pays Pourlet.
Au XVIIIe et XIXe, les hommes revêtent un gilet de couleur violet, rouge ou lit de vin sur une veste courtes, des bragoù berr et des guêtres. Au Milieu du XIXe, les hommes revêtent un gilet et une veste de laine blanche (costume qui s’apparente au costume des moutons blancs pontivyen avec des applications de velours differentes) et plus d’une centaines de boutons. Cette profusion de boutons argentés sur les gilets et vestes donnera le surnom de « mil bouton » au costume masculin. La Guerre de 1870 va provoquer une rupture, tant au niveau des hommes que des femmes. Le noir est de rigueur. Les hommes abandonnent blancs, les gilets et vestes deviennent noirs, On commence à adopter le pantalon chez les jeunes.
Les femmes portent une grande coiffe de dentelle qui recouvre le bonnet attaché par des larges lacets noués.
Au XVIIIe et XIXe, tout comme les hommes, les vêtements sont très colorés (rose, bleu, rouge vermillon, vert pour les robes et des tabliers jaune, rose, bleu, violet…). 

Jeunes mariés de Guémené. Collection Musée de Bretagne
Après  la guerre de 1870, les femmes contraintes de porter le  deuil vont adopter le noir, de rigueur. La coiffe, surnommée  la brouette (sobriquet donné par les femmes des  pays limitrophes), en breton ar garrigell, couvre totalement  les cheveux au XIXe siècle et ne va avoir de cesse de  diminuer avec le temps pour devenir très petite. Elle se  compose de quatre éléments : bonnet, ruban, sous-coiffe  avec des brides qui se nouent sur la joue et la coiffe elle-même.
Le tablier à petit devantier est richement brodé et  laisse apparaitre deux rangées de boutons sur le corsage.
Les femmes du pays Pourlet sont réputées comme étant  les plus coquettes du vannetais.
Ploërdut un jour de fête. Collection Le Carton Voyageur
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Les dernières années, il  n’est pas rare de voir quasiment disparaitre la coiffe devenue  très petite au profit de coiffure volumineuse. De  face, seules les tresses de dentelles nous indiquent que  la femme porte encore la coiffe ! Tout au long de l’évolution  de la coiffe, une coiffure historique a subsisté : le  capot. Celui-ci est composé d’un fond plissé et d’un long  bavolet de tissus doublé de couleur (violet, vert, bleu…). Il  est utilisé au quotidien et particulièrement par les jeunes  femmes et les femmes agées.
Coiffe de Ploërdut du début du XXe siècle, en coton, dentelle et ruban de moire.
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Femmes et fillettes de Kernascléden, début XXe siècle. Collection Musée de Bretagne
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Les Guémenois célèbres

Comme presque toutes les petites villes, Guémené a aussi ses célébrités. Citons d’abord l’enseigne de vaisseau Bisson, né à Guémené 1795. Il devint dans son temps le symbole du courage et de l’héroïsme en préférant sauter avec son bateau plutôt que de se laisser prendre par l’ennemi, sur la côte grecque, lors de la bataille de Navarin contre les Turcs en 1827. En 1830, un monument érigé sur la grande place, qui prit ensuite son nom, commémore son exploit. Une plaque a été fixée sur sa maison natale en 1896, plusieurs bateaux de la Marine nationale et du commerce portent son nom. Au sujet de la naissance de Bisson à Guémené, il nous a été compter l’anecdote suivante : son père était négociant et armateur à Lorient, sa mère, née Duchelas, était la fille du fameux chef chouan. Elle habitait à Lorient avec son mari. Quand, en 1795, elle arriva au terme d’une grossesse, elle se fit conduire en voiture vers Langoëlan où résidait toujours ses parents, au château du Reste ou dans leur manoir de Tronscorff. Pendant ce voyage, en haut de la côte de Mané Botlan en Lignol, un parti de Chouans qui patrouillait par-là attaqua la voiture, croyant avoir affaire à un personnage révolutionnaire important : coup de feu, la voiture est prise d’assaut, le cocher est tué. Les Chouans ne trouvent dans l’intérieur du véhicule qu’une pauvre femme affolée qui leur dit être la fille de leur chef, Duchelas. Conduite vers
sa destination, elle fut obligée de s’arrêter chez sa tante, une dame née Brossard qui habitait Guémené et, dans la nuit, mit au monde son fils Hippolyte-Magloire qui, sans ce déplorable événements, serait donc né à Langoëlan.

Ci-contre : Hippolyte Magloire Bisson
 

Nous avons aussi le grand savant : L’abbé Moigno. François Moigno naquit à Guémené en 1804. Il fonda le journal scientifique « Cosmos » puis « Les Mondes » ; il est aussi l’auteur de nombreux et savants ouvrages : leçon de mécanique analytique, de physique moléculaire…, il devint aumônier du lycée Louis-le-Grand à Paris, puis chanoine de Saint-Denis, où il décéda en 1884. Joseph Loth, ce grand celtisant, est né à Guémené en 1847, dans une maison bordant la place des halles qui porte aujourd’hui son nom. Il est l’auteur de nombreux travaux sur les langues celtiques et d’une thèse fameuse sur l’émigration bretonne en Armorique aux Ve, VIe et VIIe siècle, qui le classent parmi les grands érudits de son temps. L’ensemble de ses travaux lui a valu de la part de ses pairs le titre de « plus grand découvreur du monde celtique ». Il devint doyen de la Faculté de Rennes, professeur au Collège de France (chaire de celtique), membre d’associations savantes de nombreux pays, membre de l’Institut des Inscriptions et Belles-Lettres et fut nommé commandeur de la Légion d’honneur. Le lycée de Pontivy, où il fut professeur, porte son nom. Il mourut à Paris en 1936 et fut inhumé, selon son désir, au cimetière de Guémené.

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De gauche à droite : • François Napoléon Marie Moigno • Joseph Loth • Michel François Jégou • Charles-Xavier Brenot

L’historien de Lorient, Michel François Jégou, est aussi un guémenois, il naquit en 1825. Greffier du tribunal de Pontivy puis de celui de Lorient, il est l’auteur de nombreux travaux d’histoire : « Histoire de la fondation de Lorient, de Port-Blavet » (Port-Louis), « Marine militaire et corsaires sous Louis XIV ». Il mourut en 1890. Lorient a sa rue François-Jégou.
Citons encore le général Brenot, grand mutilé de la guerre 1914-1918, on a donné son nom à une rue de la ville.
Les deux dernières guerres on fait une sérieuse hécatombe parmi les enfants de Guémené ; un monument, qui ne manque pas d’originalité, dû au célèbre sculpteur Schweitzer, étale la longue liste de ces glorieux morts. Nous ne pouvons citer ici les noms de tous ces héros, mais nous pensons tout particulièrement, parce que plus près de nous, à nos malheureux compatriotes, vieux et jeunes, torturés est fusillés par les Allemands lors de la guerre 1939-1945, Guémené fut un foyer important de patriotes maquisards : les deux frères Trébuil, Jean Feuillet, Louis Robic, Joseph Pérès, Joseph Lardic, Louis le bail, Mathurin Fortune et son fils Fortuné, Jean-Martin, Joseph Le Calvez, Raymond Voisin, Jean Le Guennec, Émile Mazet, professeur du lycée de Lorient, etJean Hémonet. Des rues de Guémené rappellent leurs noms.

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Vues de Guéméné. Collection Michel Le Guennec

Réjouissances

Certaines réjouissances venaient périodiquement mettre un peu de joie dans les campagnes. C’est ainsi, par exemple, qu’à la fin des battages, ceux-ci se terminaient toujours par le sarrasin ou blé noir, on organisait ce qu’on appelait « Fest er freil » (fête du fléau). C’était un festin de crêpes auquel participaient toutes les personnes ayant travaillé aux battages, sans oublier les femmes, les vieux et les enfants du village.
La maîtresse de maison, assistée de quelques voisines, préparait dans la bassine en cuivre « er bilig » ou « pillic » la pâte à crêpes. Quand le dernier « bânn » (étalement des gerbes sur l’aire à battre) était battu (cela se faisait au fléau) et le grain rentré dans les greniers (le dernier sac était salué par les « youhaden » de tous les hommes), tout le monde se rassemblait dans la salle de la ferme (er ti boutic), où nos crêperières, allégées de leur corsage, toutes suantes et toutes rouges, s’affairaient devant les deux grandes poêles chauffées à points par un feu fait de bois cassé spécialement pour cela, « er stréhiatt ». On entendait le grésillement de la pâte s’étalant sur les poêles à coup de « rozell » ; puis les crêpes étaient distribuées à chacun. On les dégustait d’abord trempées dans du lait caillé (lèrh trinq) que l’on servait dans des grandes écuelles rouges, puis c’étaient les crêpes beurrées plus épaisses (crampoerh lardet) que l’on arrosait de nombreux bols de cidre, il y avait parfois des paris à qui en mangerait le plus. Enfin, un grand verre de café dans lequel le « lagoutte chiste » avec sa place, terminait ces agapes pendant lesquels les plaisanteries et les farces, parfois un peu lourdes, créaient une ambiance joyeuse et gaie. Bien entendu, on dansait aussi, tard dans la nuit, malgré la fatigue de la journée. La danse était scandée par des chants bretons comportant le rythme de la gavotte.

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Chapelles et pardons

Autour de l’église paroissiale de Guéméné il y a, disséminées dans les campagnes, des petites chapelles dédiées le plus souvent à ces saints bretons canonisés par la ferveur populaire et à qui on attribue, parfois, des dons de
thaumaturge. Elles furent érigées pendant l’époque féodale
par les seigneurs maîtres des fiefs, sans doute dans le cours des XVe et XVIe siècle. Ce sont des monuments simples surmontés d’un petit clocher. Au-dessus de la porte principale, à la voûte généralement en ogive, on remarque souvent quelques motifs stylisés et les armes du seigneur ; à l’intérieur, blanchi à la chaux, un vitrail, parfois très beau, éclaire l’autel, de chaque côté du choeur on trouve quelques saints ou saintes au milieu desquels prône le saint patron. Ces statues, généralement en bois, oeuvres des imagiers de l’époque, sont pour la plupart d’une facture naïve, les saintes mieux venues que les saints. Elles sont quelquefois habillées du costume paysan de l’époque, donnant ainsi aux chercheurs une indication intéressante. Mais beaucoup de ces monuments religieux ont disparu par manque d’entretien, on découvre ceux qui restent, le plus souvent à l’orée de villages à qui ils ont donné leur nom (celui du saint).

Église de Langoëlan en 1941. Collection Musée de Bretagne
En-dessous : église de Kernascléden, transept sud, la danse macabre. Collection Photos de Breizh

Leur pardon se résume aujourd’hui en une grand-messe,  parfois des vêpres suivies d’une procession ; leur fontaine,  si coquette autrefois, est à la mesure de la chapelle, c’est-àdire  pratiquement abandonnée. Mais, ce que nous voulons  conter ici est d’une autre époque, en ce temps-là chaque  chapelle était l’objet des soins de la population et leur pardon  revêtait une ampleur exceptionnelle. Ces chapelles
étaient le centre de ce que l’on appelait une trêve (er drin)  en breton, qui comprenait un certain nombre de villages  des alentours ; le pardon correspondait avec la fête du  saint patron, c’était un dimanche, toujours le même grand  jour de dévotion pour les habitants de la trêve auxquels
ils invitaient leurs parents et amis qui les accompagnaient  aux cérémonies : messe et vêpres. C’était aussi l’occasion  d’offrir un bon festin. La coutume voulait que les gens de  passage soient invités à déguster une bouillie de millet faite dans le « bilig » ou « pillic », chacun y puisait avec une cuillère en bois. Après le repas, pris à l’issue de la grand-messe, toutes les familles réunies pour ce grand jour retournaient vers la chapelle pour assister aux vêpres et à la procession.
Ces cérémonies, présidées par le recteur de la paroisse, se déroulaient suivant les rites habituels de l’église, revêtant une gravité à l’échelle de la foi des assistants. C’était leur pardon, le grand jour qui concrétisait pour eux leur dévotion pour ce saint qui protégeait la « trêve ».
Après les vêpres, la procession, précédée de la croix et des bannières, se dirigeait généralement vers la fontaine.
Devant le cortège, un vieux du village, portant son costume d’apparat, avait dans chacune de ses mains une clochette qu’il faisait tinter successivement en des mouvements rapides et réguliers, puis apparaissait le saint ou la sainte porté par des jeunes gens revêtus du costume aux « mille boutons », la foule venait ensuite derrière le clergé, chantant avec lui des cantiques en langue bretonne.
Les eaux de la fontaine avaient presque toujours quelques pouvoirs magiques, des vendeuses d’eau en profitaient pour offrir aux pèlerins, dans des petites écuelles rouges, le filtre bienfaisant, quelques petits sous récompensaient leur générosité. La procession se terminait assez souvent par un feu de joie. Les cérémonies religieuses terminées, on procédait à la vente des offrandes reçu pour le saint ; il y avait du linge, de la volaille et même des petits cochons. Le crieur improvisé procédait aux enchères, non sans humour, remerciant l’acheteur par un « merci pour le saint ». Bien entendu, la fin du pardon était agrémentée de danses au biniou, on et buvait beaucoup de cidre aussi, sous des tentes aménagées par quelques aubergiste qui s’installaient aux alentours de la chapelle. Puis c’était le retour par groupe vers les villages, chacun signalant sa présence et sa joie dans les landes et les chemins par les classiques « youhaden », cette imitation du cri de la chouette qui fut le signe de ralliement des chouans. Pour assister à ces pardons, la jeunesse s’habillait de ses plus beaux atouts, le gilet aux « mille boutons » des jeunes hommes côtoyait les belles coiffes de dentelle et les tabliers brodés des jeunes filles ; souvent des amours s’ébauchaient ce jour-là et l’on voyait, l’année suivante, de nouvelles ceintures de mariée accrochées dans le choeur de la chapelle. Cette ceinture, généralement toute
blanche, était la seule marque qui distinguait la mariée dans le cortège des noces.

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Ressources

Collecteurs et témoignages

• Abbé Blanchard
• Claude Le Gallic
• Jean-Michel Le Cunff
• Jorj Belz
• Louis Le Corre
• Marie-Hélène Conan-Le Baron
• Monique Le Boulc’h
• Naïg Raviart
• Raphaël Hellec
• Serge Moëlo
• Solange Le Baron-Crequer

Bibliographie

• Fiche technique Kendalc’h
• Le Bourlais Paul, Guémené-sur-Scorff : Pays des  Pourleths
• Cadic François, Les OEuvres
• Guilcher Jean-Michel, La tradition populaire de  danse en Basse Bretagne

Discographie

• CD de référence Kendalc’h
• Dvd Kendalc’h, Danse de toutes les Bretagnes, volume  VII
• Collectages conservés à Dastum - Chant : Mme Malardé  et Mme Moroch de Bubry, Mme Le Frappert de Guern,  Manu Kerjean, Yann-Fañch Kemener. Sonneurs : Le  Gall/Le Nouveau de Saint-Tugdual, Le Gal/Le Ny de Guémené-  sur-Scorff, Péricot d’Inguiniel, Barnabé et Marcel  Le Liboux de Langoëlan, Connan de Lescouët-Gouarec,  Louis Le Gourierec dit Poch Gavr de Melrand...
• Sar ar Scorv - Daniel Bieuzent, Albert Guillemot,  Jean-Michel Le Cunff (CD)

Film

• Pardon en pays pourlet en 1979 à Pennety  (Persquen) - Viviane Hélias
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Mariage vers 1930 en pays de Guéméné-sur-Scorff. Collection Musée de Bretagne