Fiche de danse

Dañsoù-labour mod Kernevodez (Piler Lann, Dañs an ambleudadeg ed du)

Terroir

Pays Rouzig - Kernevodez

Vidéos et musiques

  

Rédacteurs

Cette fiche de danse ab été rédigée en 2019 à partir des éléments soumis par Gilles Le Goff. Elle est le fruit de ses recherches et collectages débutés en 1967.

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Famille de danses

Double-front (au niveau de la forme)

Structure de la danse

Danse unique

Accompagnement traditionnel

Kan ha diskan
Chant soliste/choeur
Accordéon diatonnique ou chromatique

Forme de la danse

« On danse le piler lann devant chez Louis Corre, à Roudouhir- Kernellac’h, gare de Hanvec, lors de la noce de François- Marie Le Moigne et Germaine Marhic vers 1932 », collection Gilles Le Goff

Appellation et occasions de danse

La dañs ar piler lann, ou dañs an ambleudadeg ed du, était à l’origine une danse de travail pratiqué surtout par les hommes et parfois en mixité hommes-femmes.

1. Piler lann mod kozh - Dañs an ambleudadeg ed du

Piler-lann était le nom donné aux hommes dont le métier était de couper et de piler l’ajonc destiné à l’alimentation du bétail, particulièrement pour les chevaux. Ces hommes se déplaçaient de ferme en ferme en tant que journaliers pour faire divers travaux, et étaient souvent de condition modeste ou marginale (klasker bara = mendiant), d’où l’injure méprisante de piler-ann (pileur de lande) ou troc’her-lann (coupeur de lande), (gouzil = litière) encore utilisée dans le vocabulaire des derniers bretonnants de naissance il y a quelques années pour désigner des personnes dans le sens de « bon à rien » (informations François-Marie Galeron (1907-2010) Kernellac’h, Hanvec).
Ce pilage se faisait de diverses façons, par piétinement sur une aire de battage ou sur un sol dur avant d’être pilé à l’aide d’un maillet de bois à long manche, sur une grande dalle d’ardoise, ou dans une auge de granit peu profonde (informations par Emile Guillerm (1923-1994) Kervel, Hanvec, concernant une très grande dalle de mein glaz (pierre bleue = ardoise) adossée au mur d’un ancien marchaosi (écurie) en ruine.

Avec la modernisation au début du XXe siècle, la hache lande mécanique, an drailherez lann, fut adoptée par les agriculteurs les plus aisés, ce qui fit disparaitre progressivement le pilage aux pieds et au maillet. Cette pratique du piétinement était faite par les hommes souvent en chantant et dansant sur les pas de la gavotte, mais avec des mouvements de jambe amples et des frappés de pied et sur un rythme un peu plus lent, pour écraser les épines de l’ajonc avant le pilage (informations François-Marie Galeron (1907-2010), Kernellac’h, Hanvec).
L’appellation piler lann s’est maintenue très tardivement sur les communes du pays Kernevodez, en particulier à Rumengol, Hanvec et Saint-Eloy, jusqu’aux années 1970. Une chanson chantée par le grand-père de Gilles Le Goff, Jean-Louis Pennec (1886-1958) et sa mère Anne-Marie Pennec (1923-2012) (épouse de Jacques Le Goff) de Rumengol parle de ce thème sur un air de piler lann.

Gant ho dousig tralala, piler-lann er bloaz-mañ
matrez’ a-raok fin ar bloaz, c’hwi ‘vo deuet dre amañ
Vous, avec votre doux tralala,
pileur de lande de cette année
peut-être avant la fin de l’année vous viendrez par ici

Une des principales informatrices, Marianna Morio (1913-2004), du village de Kervel (proche Menez Meur) à Hanvec, était journalière agricole, ce qui l’a amenée depuis sa jeunesse, à pratiquer divers travaux saisonniers dans les fermes de Hanvec et Saint-Eloy et particulièrement les ambleudadeg ed du et les leur nevez à l’occasion desquels elle dansait le piler lann et le tro gavotenn. Jean-Marie Le Goff (né en 1923) du village de Kerancuru à Hanvec racontait en 2019 les souvenirs qu’il avait des journées « d’ambleudadeg ed du » dans les années 1938 à 1942 où les « vieux » dansaient en chantant pour pietiner le blé noir alors que les « jeunes » eux travaillaient au fléau.
Le pas de Marianna Morio que pratiquaient les femmes était de la même forme que celui des hommes lorsqu’il était dansé en mixité, pour « an ambleudadeg it du », mais d’une façon moins enlevée et sans retour de corps.

Autre appellation : dañs an ambleudadeg ed du (prononcer it tu)

Cette danse était aussi pratiquée à l’automne pour le piétinement des gerbes de blé noir stockées dans les granges à leur récolte en septembre, afin d’en extraire les graines ambleudadeg ed du (foulage du blé noir), toujours sur le même pas de danse semblable à ceux du piler lann et de la gavotte à laquelle les femmes participaient, en faisant un pas un peu diffèrent (informations François-Marie Galeron (1907-2010) Marianna Morio (1913-2004) Kervel, Hanvec, Anna Guillerm (1919-2017) (épouse de Jacques Morio) Kervel, Hanvec, Marie Cadec (1911-2008) Kervel, Hanvec).

Autre appellation : dañs al leur nevez (prononcer leur névé)

Elle était aussi pratiquée pour la réfection des sols de terre battue Dañs al leur nevez (danse de l’aire neuve) jusque dans les années 1940-1950, au début du XXe siècle la danse se faisait pieds nus pour malaxer le « pri-prat » (terre glaise mouillée) étalée sur le sol en réfection, et les femmes s’habillaient pour cette occasion avec la lostenn bragoù (jupe-culottes : arrière de la jupe retroussé entre les jambes et fixé au niveau de la ceinture à l’avant, sans tablier) les hommes remontaient les jambes de leur pantalon au-dessus du genou (informations transmises en 1968 par Marie Pérès (épouse de Louis Pennec, 1890-1981, Rumengol)

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« On danse le  piler lann devant  chez Louis Corre,  à Roudouhir-  Kernellac’h, gare de  Hanvec, lors de la  noce de François-  Marie Le Moigne et  Germaine Marhic vers  1932 », collection  Gilles Le Goff
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Piler lann mod nevez

Le piler lann qui était une danse de travail en pays Kernevodez a connu sa transformation en danse festive après laguerre de 1914-1918 par l’influence de la mode léonarde où la danse sur deux fronts (hommes-femmes) était pratiquée couramment.
Le terme « piler lann » en pays Kernevodez était utilisé bien avant que l’appellation « dañs giz Leon » soit entrée dans la littérature folklorique. Jean-Michel Guilcher, dans son livre La tradition populaire de danse en basse-Bretagne fait référence à Erwanez Galbrun (à qui l’on doit la première description de la danse) et qui supposait le terme justifié par l’histoire des gestes rattachables a un rite agraire. Il écrit aussi que cette interprétation a été plusieurs fois dénoncée, mais il est excessif de soutenir, par réaction, que le terme « piler lann » est étranger à la tradition populaire, car les plus anciens informateurs, nés en 1869 aux environs de Landerneau, ne connaissaient que ce terme pour cette danse qu’ils pratiquaient.

Coupe de lande dans la montagne de Kervel (Méné Kalé = Menez Meur) à Hanvec en 1948. Au centre : Jacques Le Goff. Collection Gilles Le Goff

François-Marie Galeron de Hanvec, se souvenait avoir vu  danser pour la première fois de cette façon à Hanvec vers  1920, il avait alors 13 ans et à cette époque, les hommes  dansaient en chaîne, seuls, sans se tenir la main face aux  femmes, puis la mode léonarde, par la main, s’est répandue  par la suite, tout en conservant le rythme enlevé  et le pas de la gavotte qui était pratiqué dans la mode  ancienne.  Hervé Le Menn précise dans son livre « Hanveg, parez ha  kumunn » que plusieurs personnes du pays avaient déjà,  depuis 1910, appris à danser à la mode léonarde lorsqu’ils  allaient à la « foar koz » annuelle de Sizun en pays léonard.  Jean-Michel Guilcher, dans le livre La tradition populaire  de danse en basse-Bretagne, fait part de la venue tardive  de la forme léonaise du « piler lann » dans les communes  cornouaillaises situées au sud « elle est d’importation récente,  toujours postérieure à 1900, elle ne joue qu’un rôle  secondaire, la gavotte et sa suite étant la danse propre au  pays » et précise aussi que ses rythmes et tempos son très  proches de ceux de la gavotte.
La proximité des communes cornouaillaises de Hanvec,  Saint-Eloy, Irvillac, avec les communes léonardes de Saint-  Cadou, Sizun, Le Trehou, Pencran, favorisait les mariages  mixtes (qui s’y faisaient parfois, souvent pour des raisons  pécuniaires), et a sans doute aussi influencé la pratique  de la mode nouvelle dès le début du XXe siècle. Les dictons  populaires très connus dans la région situent bien  cette mixité à la frontière des pays de Cornouaille et du  Léon.

« Etre Ar Faou ha Landerné,
n’emaoc’h nag e Leon, nag e Kerné
« Entre Le Faou et Landerneau,
vous n’êtes ni en Léon ni en Cornouaille »

Autre appellation

En pays Kernevodez, où le terme « piler lann » était en  usage, d’autres appellations étaient courantes depuis  l’adoption et la pratique de la forme léonarde.
• « dañs mod Leon », terme utilisé couramment
• « dañs a dal » (danse de front) entendu auprès de  François-Marie Galeron
• danse « face à face » entendu auprès de Marianna  Morio et Jean Herrou

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Situation géographique et historique

Le pays Kernevodez ou Kernevodenn se situe dans le nord de la Cornouaille, sur le versant ouest des Monts d’Arrée entre Aulne et Elorn jusqu’au bord de mer avec le pays Rouzig au sud, le Léon au nord, le pays Bidar et le Poher à l’est. La zone de danse de la gavotte Kernevodez se limite aux communes de Daoulas, Logonna-Daoulas, L’Hôpital- Camfrout, Irvillac, Hanvec, Le Faou, Rumengol (rattachée en 1970 à la commune du Faou), Saint-Eloy, Saint-Urbain, Dirinon et Loperhet. Les communes de Hanvec et Rumengol, où ont été réalisés beaucoup de ces collectages, se trouvent en plein coeur du pays Kernevodez. La forêt du Cranoù, vendue à Louis XIV par les seigneurs locaux du XVIIe siècle pour construire la flotte royale, fut un centre de brassage de population car le roi fit venir ses bûcherons des forêts de Camors (56) et du Gâvre (44) ainsi que d’autres forêts du royaume (renseignements fournis par monsieur Le Foll, instituteur de Rumengol et passionné d’histoire locale). Le travail du bois attirait aussi de nombreux sabotiers et bûcherons venus de communes plus lointaines (Scaër, Châteauneuf-du-Faou, Edern) ceci jusqu’en 1900 environ. Les pardons de Rumengol, très populaires, où se vendaient les chansons sur feuilles volantes, drainaient aussi des milliers de pèlerins, des commerçants, des mendiants...

Ci-dessous, madame Pennec, mère de Marguerite et Marianne Pennec, arrière grand-mère de Gilles Le Goff. Naig Gow en 1950 portant l'ancienne coiffe Kernevodez.

Informateurs, témoignages et transmission

Comme pour les fiches de danse des trois modes de gavottes du pays Kernevodez, les informateurs ici nommés, sont des personnes issues d’un milieu traditionnel ancien, n’ayant jamais dansé autrement que sous une forme populaire.

À Rumengol

• Jean Marie Brenaut (Janhic Vraz) 1878-1971 village du Cosquer, bucheron, poudrier et sa fille Marie-Anne (Mme Abalain), 1909-2012
• Marie Pérès (Pèch) (épouse de Louis Pennec, couturière 1890-1981, bourg de Rumengol
• Anne-Marie Pennec (épouse de Jacques Le Goff) couturière 1923-2012 et son père Jean Louis (Loeiz) Pennec, sabotier, marin d’état, né au village de Goulaouren à Hanvec, 1886-1958

À Hanvec

• Marjannik Morio (Mme Le Roy) agricultrice, village de Kervel, 1910-2000
• Marianna Morio, journalière agricole, village de Kervel, 1913-2004
• Marie Cadec, agricultrice, village de Kervel, 1911-2008
• Anna Guillerm (épouse de Jacques Morio), agricultrice, village de Kervel, 1919-2017
• Marianna Le Roy, ménagère, Kroaz Boudouguen, 1900-1985
• Emile Guillerm, agriculteur, village de Kervel, 1923-1994
• François-Marie Galeron, agriculteur, Kernellac’h, 1907-2010
• Hervé Le Menn (Veigt Ar Menn), sonneur écrivain, Pen Ar Rhun, 1899-1973
• Yves Le Cann (Cheun Ar ‘Hann), instituteur, bourg de Hanvec, 1915-1980
• Jean Herrou, cheminot, accordéoniste et Victor Herrou, chauffeur, accordéoniste, 1919-2011 et 1921-2008
• Jean Pouliquen, agriculteur, Le Pont Neuf, 1930
• Jean-Marie Le Goff, agriculteur, jardinier, Kerancuru, 1923

À Saint-Eloy

• Joseph (Jop) Yvinec, agriculteur, accordéoniste, 1898-1978
• Marianne Ferec, (Nan-na Kerhéré), journalière blanchisseuse, 1905-1990
• Jean Marie Le Nard, Kergoarem, agriculteur, 1895-1980

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De gauche à droite : 1 - Francois-Marie Galeron en 1998   2 - Marjannik Morio à la noce Le Goff en 1974   3 - Marie Cadec en 1960   4 - Marianna Morio à la noce Le Goff en 1974 - Collection Gilles Le Goff

Forme et structure de la danse

La danse a conservé la forme du double-front originel : le double-front britannique (hommes d’un côté, femmes de l’autre). Le piler lann peut se danser de quatre manières :
• en forme ancienne par des hommes seuls
• en forme plus récente, avec hommes seuls face aux femmes seules
• en mixité femmes-hommes seuls, sur le pas pratiqué par les femmes avec frappé très fort du pied droit à plat au temps 8 dans l’esprit du piétinement du blé noir ou de l’ajonc
• à la mode léonarde, hommes se tenant la main ou le doigt, en chaîne, face aux femmes seules.

P O U R   L E S   H O M M E S

Tenue et mouvement des bras

Pour la mode léonarde par la main ou le doigt

Temps 1 : Les avant-bras tendus vers l’avant a hauteur sous poitrine s’abaissent fortement, mains vers l’arrière des cuisses
Temps 2 : Les avant-bras se relèvent, pour reprendre la positon hauteur sous poitrine
Temps 3 : Identique au temps 1
Temps 4 : Identique au temps 2
Temps 5 : Les bras restent au même niveau qu’au temps 4 et tendent légèrement en s’ouvrant
Temps 6 : Les bras retombent en gardant leur position précédente
Temps 7 : Les bras se lèvent au niveau de la poitrine
Temps 8 : Les bras continuent de se lever, en faisant une saccade, tendus très haut au niveau de la tête, le torse se penchant vers l’arrière.

Pour les modes autres que la mode léonarde, les hommes peuvent avoir les mains libres qui ponctuent le pas de la danse, ou tenant les revers du bas de leur veste ou autre vêtement, ou une main libre ponctuant la danse et l’autre au revers d’un vêtement ou glissé dans la poche ou la ceinture.

Technique de pas

Temps 1 : La jambe droite vient croiser l’avant de la jambe gauche et le pied droit se pose à plat devant le pied gauche
Temps 2 : Le pied gauche se lève vers l’arrière, la jambe avance de côté et le pied se pose a 30 / 40 cm
Temps 3 : La jambe droite vient croiser l’avant de la jambe gauche, pied droit devant pied gauche
Temps 4 : Le pied gauche se lève vers l’arrière, la jambe avance de côté et le pied se pose a 30/40 cm
Temps 5 : La jambe droite se lève et se replie en faisant un large arrondi du pied vers l’arrière, le torse reste droit sur ce temps qui se fait dans un mouvement de hanches.
Temps 6 : Le pied droit se pose vers l’arrière et la jambe gauche vient croiser l’avant de la jambe droite avec un levé-lancé du pied vers la gauche
Temps 7 : Le pied gauche se pose et le pied droit se lève légèrement
Temps 8 : Le pied droit vient (à plat) frapper fortement le sol sur l’avant, en faisant pencher le torse vers l’arrière. On peut aussi parfois frapper le sol d’un coup de talon. On retrouve dans ce pas, celui de certaines figures des meneurs de gavotte (le frappé de pied à plat au temps 8 est caractéristique de cette danse pratiquée pour le travail. A l’origine, on remarque aussi ce frappé au temps 1 de la gavotte, effectué particulièrement par Marianna morio (film 2003).

Style

Pour les quatre modes, le rythme de la danse reste le même, se situant entre l’allure calme et posée du Léon et l’énergie plus festive et dynamique de la gavotte. Le départ de la danse pour les hommes comme pour les femmes est au pied droit. Comme pour la gavotte, les hommes dansent de côté, sur un rang, en avançant légèrement de biais vers la gauche, avec de grands pas croisés de coté sur les quatre premiers temps sur environ 1m-1m50, et, comme pour la gavotte, les quatre derniers temps se font quasiment sur place avec un petit retour du corps de face.

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POUR   LES   FEMMES

Tenue et mouvement des bras

Le mouvement des deux bras en balancé alternatif avantarrière était le plus souvent pratiqué, sans tenir ni robe ni vêtement lors des danses de travail. Il n’était pratiqué que par un seul bras si besoin, l’autre replié portant le sac, ou autre chose, pour d’autres occasions de danse. La forme avec les avant-bras repliés (et non croisés) sous la poitrine était aussi très courante (film où l’on voit danser Marianna Morio en 1993), ainsi que les mains ou une main dans les poches du tablier ou dans les godelloù (ceinture avec poches) sous le tablier.

Technique de pas

Pas des femmes pour le piler lann mod nevez (départ pied droit)

Temps 1 : Le pied droit se pose vers la droite et le corps prend une position face à la marche
Temps 2 : Le pied gauche effectue un pas en marchant de face
Temps 3 : Grand écart de la jambe et du pied droit vers le côté droit
Temps 4 : Glissé rapide et fort du pied gauche venant rejoindre le pied droit faisant une suspension assez forte en demi-semelle, soulevant le corps d’un coup d’épaule
Temps 5 : Le pied gauche se pose avec un léger recul vers le côté gauche en faisant un retour du corps vers la gauche
Temps 6 : Le pied droit avance sur un pas face aux hommes
Temps 7 : Le pied gauche avance sur un pas face aux hommes
Temps 8 : Le pied droit vient frapper le sol à plat en croisant le pied droit de l’homme, puis recule. Enfin, le corps se retourne vers la droite pour amorcer le temps 1 

Dans certaines vidéos, le mouvement relativement vertical et l’allant dans la danse laissent entrevoir la possibilité d’un changement d’appuis sous la forme d’une subdivision en 3 et 4 dans le pas de la femme.

Variante

Pas de Marianna Morio pour « ambleudadeg ed du »

Temps 1-2-3-4 : Départ pied droit sur quatre pas avancés de face
Temps 5 : Arrêt sur place avec frappé à plat du pied droit en écart vers côté droit
Temps 6 : Frappé pied droit légèrement en arrière vers coté pied gauche
Temps 7 : Frappé pied gauche sur place
Temps 8 : Frappé pied droit vers l’avant pour le refrapper départ temps 1

Style

Les femmes dansent en avançant de face sur les 2 premiers temps, puis font un grand écart chassé de côté vers la droite aux temps 3 et 4. Puis sur un retour du corps vers la gauche à compter des temps 5-6, elles avancent en marchant face à un homme pour effectuer un frappé du pied droit en le croisant avec celui de l’homme elles se tiennent droites, regardant face à elles, sans faire de penchés du corps ou de la tête.
À la façon de Marianna Morio en avançant en marchant sur les 4 premiers temps, puis sur place avec deux frappés du pied droit temps 5 et 6, frappé pied gauche temps 7, frappé pied droit vers l’avant temps 8 pour avance sur pied droit au temps 1.
Le style est marqué par beaucoup d’allant, avec des appuis francs, la danse est tonique.

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Accompagnement musical

Chant

Le « piler lann », comme le « tro gavotenn » ( gavotte ordinaire) était surtout dansé lors des journées de travail ou après les battages, les récoltes... Il était chanté dans la danse, avec un meneur de chant qui était repris par les autres danseurs, ou sous forme de kan ha diskan comme pour la gavotte. Les chansons accompagnant « le piler lann » étaient souvent composées par les chanteurs eux-mêmes, sur des thèmes souvent légers, voire satyriques. Du côté léonard les chansons pouvaient se moquer des filles de Hanvec :  Merc’hedigoù Hañveg o klasket da zimeziñ,

‘zo ‘pad ‘n deiz barzh toull an nor, da c’hortoz martoloded
pa laker un tok martolod, war ar benn un touseg,
setu ‘mañ taped diouzhtu, merc’hedigoù Hañveg
Les filles de Hanvec qui cherchent à se marier,
sont toute la journée au pas de leur porte
à attendre des marins.
Quand on met un béret de marin sur la tête d’un crapaud,
voilà tout de suite attrapées les filles de Hanvec

Alors que du côté des cornouaillais on se moquait des  léonards :

Gwiskamanchoù leonard a zo dilhad divalao,
an hanter eus an otoù ‘zo dirak ar bragoù !
Les vêtements léonards sont de vilains habits,
la moitié de leur culotte (caleçon) est devant le pantalon !
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Accordéon

Depuis les années 1930 et jusqu’à nos jours, le piler lann était aussi dansé au son de l’accordéon à l’occasion de fêtes ou de bal, parfois de noces, mais il n’était jamais sonné au couple biniou-bombarde (explications de Janhic Vraz (Jean Marie Brenaut 1878-1971) sonneur de biniou de Rumengol).

Jop Yvinec en 1968

Tempo

Cédric Moign, professeur de musique traditionnelle au conservatoire de Brest, lui-même originaire de Rumengol a fait une étude sur des enregistrements anciens et traditionnels, chantés ou joués à l’accordéon, dans le pays Kernevodez : « Souvent cette danse est décrite comme lente, peu dynamique, etc, alors que la matière collectée dansle nord de la Cornouaille atteste du contraire.

En effet, les  relevés effectués montrent tous des vitesses de tempos  supérieures à 110 pulsations/minute en début de danses,  pour se stabiliser tous au-dessus de 120 pulsations/minute.  Nous avons remarqué que tous les enregistrements des référents  en la matière (avant 1970) sur lesquels nous avons  travaillé, débutaient sur un tempo de 110/112 pouvant  progresser jusqu’à 128 sur certains airs. L’idéal semblerait  être 122/124, ce qui est bien enlevé et loin d’être lent.»

CD de référence

1. An intañvez - air chanté par monsieur Manach de Saint-Eloy-Sizun, accompagné de monsieur et madame Millour de Sizun en 1970 lors d’une fête organisée à Hanvec par Hervé Le Menn pour le centenaire de la mort de Jean-Pierre Marie Le Scour, originaire de Boudourec à Hanvec - enregistrement par Jean Le Menn
2. Troc’had lann Menez Are - extrait radio
3. Piler lann - accordéon par Victor et Jean Herrou, un des derniers jazz-band du pays
4. Ar Judée (nom d’un lieu dit où se trouve une chapelle) - accordéon par Job Yvinec
5. Dañs ar piler lann - an ambleudadeg ed du - accordéon par Job Yvinec - accordéon - 1969

 

Mode vestimentaire

Costume des hommes

Dans les communes de Rumengol, Hanvec et Saint-Eloy, plus au sud-est du pays Kernevodez, le costume masculin était identique à celui des pays Bidar et Rouzig : gilet bordé de velours ouvert en cornes, chupen à basques, deux rangées de boutons de jais avec fausses boutonnières et turban en tissu de laine bleu, chapeau à large ruban aux bords relevés sur les côtés à la « cow boy ». Au nordouest, dans les sept autres communes, le costume masculin était différent : gilet de la même coupe que le précédent, mais avec les « cornes » repliées en revers, chupenn court avec deux petites rangées de boutons sur les côtés et bas des manches, col droit et revers larges parfois de velours, turban bleu ou à rayures ou carreaux, et pantalon à pont à carreaux ou rayures pour les deux modes.
Le costume traditionnel a été porté par les hommes âgés jusqu’aux années 1925-1930. Après la guerre 1914-1918, les jeunes hommes l’ont délaissé au profit d’un habit de ville, mais en conservant, pour beaucoup d’entre eux, le chapeau traditionnel qui etait encore porté par certains dans les années 1960-1965.

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Costume des femmes

Il est quasiment identique à celui porté dans les pays Bidar et Rouzig, seules les coiffures sont différentes. La coiffe arrée appelée koeff Kernevodez ou koeff Daoulas, dont les plis donnaient une forme de toiture bien prononcée, avec les troñsoù (larges ailes) plaqués sur les côtés. Initialement portée sur toutes ces communes, elle a été progressivement délaissée au profit de la coiffe à ailes ouvertes, dite koeff Kastellin depuis le début du XXe siècle dans les communes les plus au sud (Rumengol, Hanvec, L’Hôpital-Camfrout). La koeff berr (ou koeff bourlok ou koeff noz), en forme de bonnet phrygien, qui était portée dans les communes plus au nord (Irvillac, Dirinon, Saint-Urbain), a progressivement disparu après la guerre 1914-1918, remplacée par la koeff Kernevodez. Le kapig du (petite cape noire), coiffe de travail ou d’hiver, était en tissu de coton ou laine et bordé de velours. Elle entourait la tête jusqu’aux épaules.

Mariage mixte léonard-kernevodez à Hanvec en 1905, entre Mlle Léon, agricultrice de Kervezennec à Hanvec et François Fagot, marchand de vin à Sizun. Collection Gilles Le Goff

Ressources

Chants et musique

• Trois enregistrements par Gilles Le Goff de Jop Yvinec lors d’un bal à Hanvec en 1969
• Un enregistrement par Hervé Le Menn de monsieur Manach de Saint-Eloy, Sizun et madame Millour de Sizun, lors du centenaire de la mort de Jean-Pierre Marie Le Scour à Hanvec en 1970
• Un enregistrement radio : coupe de lande

Vidéo

• Marianna Morio en 1993 et en 2003
• Jean Pouliquen en 2005

Bibliographie

• Le Menn Hervé, Toniou biniou, 1940, Istor hanveg, parrez ha kumun, 1974
• Le Cann Yves, Digor an abadenn, 1950
• Guilcher Jean-Michel, La tradition populaire de danse en basse-Bretagne, 1963
• Laurent Charles (oncle Donatien Laurent), Evolution du costume en Cornouaille léonaise, bro Kernevodez Dastum Bro Gerne, 2011
• Guide touristique M.A.I.F, 1967

Mariage de Maria Rozuel de Rumengol et monsieur Marhic en 1920. Collection Gilles Le Goff
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Remerciements

• Michelle Le Draoulec de Sainte-Marine pour son travail  sur le pas des femmes en piler lann et gavotte  Kernevodez, et pour son investissement de transmission  auprès des cercles celtiques.
• Cédric Moign de Rumengol et professeur de musique  traditionnelle au conservatoire de Brest pour ses recherches,  son intérêt et la passion qu’il porte au pays  Kernevodez, son étude des tempos, du style, des  appuis et des ornementations sur différents airs des  modes anciennes et plus récentes de piler lann et  pour les gavottes et bal dans les fiches précédentes.
• Tristan Gloaguen de Châteauneuf du Faou pour ses  recherches et collectages d’airs et chansons de piler  lann et gavottes kernevodez qu’il travaille sur divers  instruments avec beaucoup d’intérêt et de passion.
• Bernard Langlois pour l’écriture de la danse
• Michel Guillerme pour la relecture

Rappel

La Commission danse de Kendalc’h tient à rappeler un certain nombre d’éléments qui prévalent à l’élaboration de cette  fiche de danse. Il en est strictement de même pour toutes les fiches à ce jour publiées. La version proposée dans une fiche de danse fait suite à une étude longue, profonde et sérieuse qui s’appuie sur des sources et témoignages fiables. Cette fiche qui se veut un témoignage intangible, valorise une version, probablement la plus répandue de cette danse. Mais tout naturellement, même si nous la considérons comme majeure,  cette version ne peut en aucun cas se prévaloir d’être l’unique version, il peut exister des variantes, liées à l’époque de référence, les lieux, l’âge et l’implication des personnes qui ont été porteuses de cette tradition et qui nous l’ont transmise.  Penser différemment, serait totalement contraire à l’éthique qui entoure notre action vis-à-vis de notre environnement patrimonial.