Fiche costume

Coiffes du pays Kernevodez

Terroir

Rouzig - Kernevodez

Groupe vestimentaire

Kernevodez

Période étudiée

1850-1960

Rédacteurs

Fiche rédigée en 2017 par Gilles Le Goff.
Elle fait partie d’un ensemble :

  • Pays Kernevodez avant 1900
  • Pays Kernevodez.de 1900 à 1960...

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Groupe vestimentaire

Le pays Kernevodez correspond au groupe vestimentaire de l’ancien canton de Daoulas où était portée la coiffe « Kernevodez  » dite aussi « coiffe carrée de Daoulas ».


Koef berr de 1900-1910 à Daoulas avec kamizolenn porté sous le krapoz, et le bas des manches « stammet kroket » (croquet tricoté à quatre aiguilles).
Collection Gilles Le Goff

Situation géographique et historique

La mode présentée est celle du pays Kernevodez (féminin de kernevod, habitant du nord de la Cornouaille et de l’ouest des monts d’Arrée) encore appelée kernevodenn ou kernevodenned, et en français Cornouaille léonaise, qui s’étend des monts d’Arrée à la rade de Brest et de la rivière du Steir Goz au sud, à la rivière d’Elorn au nord. Cette mode était portée sur les onze communes suivantes : Loperhet, Dirinon, Saint-Urbain, Saint-Eloy, Irvillac, Daoulas, Logonna-Daoulas, Hanvec, L’Hôpital-Camfrout, Rumengol, Le Faou.

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Coiffes

Le costume féminin est quasiment identique à celui porté dans les pays Rouzig et Bidar avec quelques petites variantes qui le distingue des modes voisines, excepté pour les coiffes. Trois coiffes différentes étaient portées avec le même costume, selon les communes. En dehors de ces trois coiffes, il existait des coiffes d’artisanes, de travail ou d’hiver, ainsi que des coiffes de deuil, des bonnets de fillettes.

1.  Koef Kernevodez

Encore appelée koef Daoulas ou coiffe carrée de Daoulas portée sur la plupart des communes. (Le terme Kernevodez est fréquemment employé dans le livre de Charles Laurent, «évolution du costume en Cornouaille léonaise»). Cette coiffe était de toile de lin fin jusqu’à la fin du XIXe siècle , avec un fond large (kern) posé en arrière de tête sur un chignon recouvert d’une pièce apparente de satin ou soie de couleur, avec des tronsoù (ailes) très larges, plaquées de chaque côté de la tête et se chevauchant l’une sur l’autre au-dessus, ou se croisant de biais, en arrière de la visachenn (partie avant de la coiffe). Elle était entourée par deux lassoù (lacets) cousus de chaque côté de la coiffe, noués en nœud plat sur la bordure arrière du fond de coiffe ou d’un seul lacet libre et plus long épinglé autour de la coiffe selon les communes. La face avant de la coiffe (taledenn ou visachenn) est disposée en forme de toiture avec trois angles bien prononcés et recouvre entièrement la chevelure. Cette coiffe a progressivement diminué en taille jusqu’à nos jours, en conservant sa forme initiale, pour ne plus recouvrir que l’arrière de la tête. Elle était épinglée sur une rujerez (ruban de coton noir d’environ 1 mètre de longueur) qui maintenait le troñs bleo (chignon). Cette rujerez était fixée sur un krib round (peigne en demi-cercle) coiffant l’avant de la chevelure vers l’arrière. Au début du XXe siècle, la coiffe était en tulle rond, gaze, linon ou mousseline, puis en gaze et tulle carré jusqu’à nos jours. Au repassage de la coiffe les tronsoù et la visachenn étaient repliés, 1/3 sur 2/3 avec un pli central et deux plis en biais ouvert de 1 à 2 cm au niveau des deux angles de côté (kornia ar c’hoeff, pecha ar c’hoeff). Cela permettait de positionner les tronsoù vers l’arrière de la coiffe avant de les plier au-dessus.

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Koef Kernevodez.
Collection Gilles Le Goff
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A droite : coiffe et col Kernevodez de Dirinon vers 1930, portée en 1990.
Collection Gilles Le Goff
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Costumes Kernevodez de cérémonie vers 1900-1910.
Collection Gilles Le Goff
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Costumes Kernevodez de cérémonie vers 1900-1910.
Collection Gilles Le Goff
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Coiffe Kernevodez dépliée en signe de deuil ou pénitence vers 1900-1910.
Collection Gilles Le Goff
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Coiffe de L’Hôpital-Camfrout vers 1930, encore portée en 1990.
Dans «Dernières coiffes de Bretagne» de Christian Nicot.
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Coiffe d’Irvillac vers 1930, encore portée en 1990.

2.  Koef berr

Encore appelée koef noz, koef bourlok ou toukenn, elle était portée dans les communes les plus au nord (Loperhet, Dirinon, Saint-Urbain, Irvillac, Daoulas) et a totalement disparu après la guerre 1914/18 au profit de la coiffe Kernevodez. Certaines femmes utilisaient les deux modes : koef berr la semaine, Kernevodez le dimanche. Cette coiffe à fond très haut, en forme de bonnet phrygien qui se relève en cimier vers l’avant, était maintenue par un las (lacet) avec un nœud très large sur la nuque qui se voyait de face selon les communes.

Koef berr de Loperhet en 1900-1910.
Collection Gilles Le Goff
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Jeunes femmes en koef berr à Irvillac en 1900-1910.
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Coiffe du Sud.
Collection Gilles Le Goff
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 Koef mod Kastellin avec troñs-blev à Rumengol (1930-1990).
Collection Gilles Le Goff
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 Marharit Maréchal (Mme Hétet) de Hanvec.
Photo en 1985 par Gilles Le Goff
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Thérèse Yvinec, employée de l’école de Rumengol,  était toujours très bien coiffée avec les ailes en ovale comme il devait d’être dans les années 1950 à 1980.
Photo en 1970 par Gilles Le Goff
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Fonctionnali

Bleo lakeed (troñs bleo), qui était fixé par le rujerez pour faire le chignon des coiffures mod Kastellin.
Collection Gilles Le Goff

3.  Koef Kastellin

Cette coiffe à la mode de Châteaulin a la même coupe à l’origine que la coiffe Kernevodez et a remplacé progressivement celle-ci dans les communes plus au Sud-est (Rumengol, Hanvec et Saint-Eloy) et ce, depuis le début du XXe siècle, avec un abandon plus rapide après la guerre 1914/1918. Ce changement de mode a été influencé à la fin du XIXe siècle par les jeunes filles, élèves de l’école de laiterie du château de Kerliver, pour beaucoup originaires de la région de Châteaulin, et par la réquisition des femmes par l’état pour travailler à la poudrerie du Pont-de-Buis durant la guerre 1914-1918. Les femmes qui avaient conservé la coiffe Kernevodez surnommaient cette coiffe « coiffe numéro huit » ou encore « sparlenn » en référence au « sparl » (longue barre de bois que l’on fixait entre les cornes des vaches pour les empêcher de traverser les haies). Les femmes de ces communes qui portaient la coiffe carrée Kernevodez ont commencé par en ouvrir les ailes en forme d’angles pointus, par imitation de la mode « Kastellin » pour l’abandonner par la suite au profit de cette mode qu’elles trouvaient plus seyante. Cette coiffe mod Kastellin était posée sur la rujerez qui maintenait le troñs bleo (coussin de tissus bourré de stoup (laine cardée), surnommée aussi par moquerie « lardezenn » en référence au chiffon en boule qui servait à graisser les biligoù (poêles à crêpes), ou un « bleo lakeed » (postiche de cheveux) sur lequel les cheveux étaient remontés très haut en chignon bombé. La coiffe était montée sur un foñs du (forme de carton léger recouvert de tissus noir) qui avait remplacé la pièce de soie ou satin de couleur du XIXe siècle. En semaine, beaucoup de femmes n’arboraient que la rujerez sans la coiffe. Lors du repassage des coiffes Kernevodez et mod Kastellin, jusqu’en 1920 environ, afin de donner la forme carrée de toiture ou soutenir les ailes, on incorporait dans la visachenn et les tronsoù la paille d’un épi de flach (molinia) qui était récolté en fin d’été dans les Yun (landes humides, tourbières). Par la suite, la coiffe ayant diminuée de taille, ces pailles n’eurent plus d’utilité. Au repassage, comme pour la coiffe Kernevodez, les tronsoù et visachenn étaient repliés 1/3 sur 2/3, un pliage central donnait une forme de toiture. Au montage, sur le fond cartonné, les lassoù étaient remontés, ce qui formait une corne pointue de chaque côté de la coiffe, bien visible de face, puis étaient noués en un nœud plat sur la bordure arrière. Lors de la pose sur la tête, les tronsoù étaient pincés en dépassant de 1 ou 2 cm de chaque côté de la visachenn pour former un angle pointu, puis descendaient en léger biais vers l’arrière et étaient épinglés sur la rujerez. Un autre pincement pour former un angle était fait dans le bas avant de remonter les tronsoù en ovale et épinglés en arrière de la visachenn sur le sommet de la coiffe. Jusqu’en 1920 les mariées et filles d’honneur arboraient la rozetenn, ruban garni de perles et de plumes entourant la coiffe avec un grand nœud à l’arrière. Cette rozetenn a par la suite été remplacée par la gurunenn eured (couronne de mariage à la mode de la ville) qui barrait le front de la mariée dans les années 1930. Les cheveux, qui jusqu’en 1920 étaient tirés vers l’arrière ont pris une forme gonflée vers l’avant (poufa bleo) avec parfois des crans et frisures, suivant la mode, à l’aide d’un fer à friser. Pour se coiffer (ficha bleo) et faire le troñs bleo bien lisse, le peigne était humecté de lait écrémé. Ar c’holier (le col), indissociable de la coiffe était très large, croisé sous le menton jusqu’à la fin du XIXe siècle a par la suite rétréci progressivement comme la coiffe. Ce col arrondi, en gaze, linon ou tulle carré, dégageant la nuque avait un pleg don (pli creux) dans le bas, sur toute sa longueur et trois plis importants en centre soulignés par de nombreux autres petits plis. Dans les dernières années, il était porté uniquement pour les grandes occasions (cérémonies, fêtes, mariages).

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4.  Koef artisaned (coiffe artisane)

Cette coiffe était portée par les artisanes, les commerçantes et les femmes de notables à Daoulas et au Faou. Elle était sensiblement du même modèle que les coiffes « jenoz » et « marmotte » de Brest et de Landerneau.

5.  Kapig du (petite capeline noire)

Coiffe de travail, de semaine ou d’hiver. Cette coiffe en drap noir bordée de velours avec un fond plissé, enserrait la tête jusqu’aux épaules, avec un lacet noué à l’arrière de la nuque. Elle était encore portée dans les années 1950-1960 par les femmes âgées.

6.  Kap brizh (capeline grise)

Cette coiffe de travail aux champs en tissu pointillé noir et blanc était formée d’un fond, de volants plissés cachant le raccord et garnie d’une grande viagère sur l’avant.

7.  Jibilinenn

Cette capeline, appelée aussi manteled kañv (capeline de deuil), n’était portée que pour les obsèques d’un proche en signe de grand deuil ou pour des cérémonies mortuaires (anaon). Elle recouvrait les épaules jusqu’aux coudes et était disposée sur la coiffe blanche, laquelle avait les ailes dépliées pour cette occasion (koef displeget). Ces ailes tombaient librement sur l’avant pour la Kernevodez ou étaient épinglées croisées sur la poitrine pour la mode Kastellin. Cette jibilinenn était de drap noir bordé d’une bande de velours de 10 cm de large avec un pli faitier transversal en forme de capot et deux longs rubans de soie moirée (seizenn) sur les côtés formant un nœud à l’arrière et fermée à l’avant par une chaînette de métal argenté avec deux agrafes en forme de coquillage.
 

Kapig du, coiffe de travail. Collection Gilles Le Goff
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Kapig du, coiffe de travail.
Collection Gilles Le Goff.
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Jibilinenn de Mme Galéron de Hanvec.
Collection Gilles Le Goff

8.  Koef war c’horre

Cette coiffe de dessus, capot blanc ou coiffe de pluie a été portée jusqu’à la fin du XIXe siècle sur la coiffe les jours de mauvais temps. Elle était de flanelle blanche bordée d’un liseré de couleur, avec un fond carré et trois pans ouverts : un pan large couvrant le haut du dos et deux autres pans retombant de chaque côté à l’avant sur la poitrine.

9.  Feltr

C’est une grande forme de chapeau ou un bonnet de feutre qui se mettait sur la coiffe les jours de pluie au XIXe siècle.

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Coiffure enfant

Le boned voulouz du (bonnet de velours noir) était porté par les fillettes jusqu’à l’âge de 12 ans puis était remplacé par la coiffe à l’occasion de pask kentañ (communion solennelle). Ce bonnet de velours, pour les cérémonies, était agrémenté de perles et de plumes et d’un grand nœud de ruban de velours noir descendant jusqu’au milieu du dos ainsi que de deux longs rubans de soie noire moirée qui encadraient le visage sur l’avant. Il était maintenu par un autre ruban ou lacet sous le menton et noué sur le côté. Ce bonnet était de même coupe pour les baptêmes boned badeziant, mais en satin blanc ou crème avec des rubans de soie fleurie et était assorti d’une grande collerette de dentelle (gouzougenn). En semaine les fillettes arboraient un simple ruban de couleur noué sur un côté de la chevelure en guise de coiffure.

Bonedoù voulouz du.
Collection Gilles Le Goff
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Bonedoù voulouz du.
Collection Gilles Le Goff

Ressources

Témoignages

Notes relevées depuis 1967 par Gilles le Goff auprès de :

  • sa grand-mère Marie Pérès (1890-1981), mariée à Louis Pennec, qui était « kemenerez » (couturière) dès l’âge de 13 ans à Rumengol, et qui allait de place en place pour confectionner les habits de mariages et autres. Elle était logée durant plusieurs jours pour avoir à disposition la personne qu’elle devait habiller, avant de rentrer finir les costumes chez elle
  • sa mère Anne-Marie Pennec (1923-2012), mariée à Jacques Le Goff,  kemenerez à Rumengol
  • Jeanne Pérès (1895-1968), soeur de Marie Pérès, « empoezerez » (repasseuse de coiffes, blanchisseuse et brodeuse) à Rumengol
  • Marie-Jeanne Runambot (1882-1972), kemenerez à Rumengol
  • Hervé Le Menn, (Veig Ar Menn) (1899-1973) de Hanvec
  • Charles le Gall (Charlez Ar Gall ) (1921-2010) de L’Hôpital-Camfrout, qui a animé des émissions de radio et télévision en langue bretonne de 1959 à 1976
  • De nombreuses personnes de Rumengol, Hanvec, Saint-Eloy, L’Hôpital-Camfrout, etc.

Livres

  • Lectures pour tous, revue fin XIXe/début XXe siècle
  • Laurent Charles, Evolution du costume en cornouaille léonnaise, fin des années 1960
  • Le Menn Hervé, Istor Hanveg, parez ha kumunn, début des années 1970
  • Nicot Christian, Dernières coiffes de Bretagne, éditions Le Télégramme, 1997

Images

  • Documents photographiques et costumes de la famille de Gilles Le Goff
  • Cartes postales collection Gilles Le Goff et musée Kernevodenn de Dirinon
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Kapig du et bonedoù voulouz du de L’Hôpital-Camfrout. Collection Gilles Le Goff

Remercieme nts

  • Photographies : Frédéric Harnois, Guy Maro, Yvette Le Stanc
  • Retouches photo : Ronan Le Goff
  • Coordination : Annie Raulo, commission costumes de Kendalc’h
  • Images : Confédération War’l Leur (Marlène Le Querler, Tristan Gloaguen)
  • Renseignements et conseils : Marlène Le Querler, Joëlle Le Goff
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Evolution de la coiffe Kernevodez de 1914 à 1920.
A gauche Marianne Couchouron (Mme Rozuel) d’Hanvec, à droite sa fille Maria.
Collection Gilles Le Goff